L’ambroisie à feuilles d’armoise pose
aujourd’hui un problème de santé publique à une échelle grandissante. Son pollen, émis à la fin de l’été, est un puissant allergisant : cinq grains de pollen par mètre cube d’air suffisent à
provoquer des réactions chez les individus les plus sensibles. Il déclenche rhinites, conjonctivites, trachéites… et parfois urticaire ou eczéma. Selon les régions, 6 à 12 % de la population
française serait affectée par ces réactions allergisantes. Dans les zones très touchées comme le Québec ou la Hongrie, l’ambroisie provoque des crises d’asthme pour 25 % des personnes sensibles.
(Photo = INRA DIJON)
Mais l’ambroisie est aussi une nuisance pour l’agriculture et l’environnement. Au printemps, cette espèce annuelle peut fortement se développer dans les cultures qui viennent d’être semées comme
le pois et le tournesol, ou sous le couvert de cultures d’hiver telles que le colza ou le blé. Elle progresse aussi le long des voies de communication et colonise les zones découvertes.
L’ambroisie nuit aux rendements des cultures et rend difficile la gestion de la qualité des récoltes. Sa maîtrise génère ainsi des coûts importants pour les agriculteurs et les gestionnaires des
espaces colonisés.
Cette plante originaire d’Amérique du Nord a été introduite involontairement en France au cours du XIXe siècle dans la région Rhône-Alpes. Elle occupe aujourd’hui un vaste territoire, qu'elle a
colonisé lentement mais régulièrement, touchant la Bourgogne, le Centre, la Provence et les Alpes. Au niveau européen, selon le projet
Daisie, elle figure parmi
les 100 espèces invasives les plus problématiques.
L’ambroisie affectionne les milieux perturbés par les activités humaines. Une fois installée, sa tolérance aux stress (sécheresse, milieux pauvres en éléments nutritifs) lui permet d’occuper des
zones où elle n’est que très peu concurrencée par d’autres espèces végétales. Elle disparaît dès que la compétition est trop forte. Ainsi, on ne la trouve qu’exceptionnellement dans les prairies
permanentes. Dans les zones agricoles, les populations peuvent atteindre des tailles plus importantes qu’en bord de rivière ou de route. Pourtant, avec une production de semences très tardive
comparée à d’autres
adventices, l’ambroisie
semble a priori peu adaptée à la survie dans les cultures. Mais c’est sans compter sur la longévité de ses semences, d’environ dix années, et sur leur taille importante, propre à faciliter son
installation. Le relâchement des interventions pendant la période d’intercultures (déchaumage
insuffisant, cultures intermédiaires
faiblement recouvrantes) est propice à la constitution de stocks de semences importants dans les champs et leurs abords.
C’est grâce aux collections d’herbiers français que nous avons pu retracer l’historique de son extension en France :
Comment gérer cette espèce pour contenir l’invasion et limiter ses nuisances ?
Comme pour toutes les espèces
envahissantes, la gestion préventive de l’ambroisie est une obligation à caractère strict et incontournable. Tant qu’elle est peu présente, l’éradication des petites populations est possible à
condition de bien sensibiliser l’ensemble des acteurs, dont les agriculteurs, à la détecter et à l’éliminer dès son apparition. Une politique de limitation de la dispersion des semences par les
engins agricoles et les déplacements de terres peut être très efficace. La gestion des tas de terre fait l’objet d’une règlementation qui n’est malheureusement pas toujours respectée car très
contraignante. (Photo: Ambroisie broutée par les moutons = Essais DROME°)
Dans les cultures, lorsque la présence d’ambroisie devient importante, le désherbage chimique est la solution la plus efficace du fait de la très grande tolérance de cette "herbe à poux" aux
pratiques de désherbage mécanique. Mais la gestion des herbicides doit être raisonnée de manière à réduire le risque d’apparition de résistances car même si aujourd’hui aucun cas de résistance
n’est répertorié en Europe, plusieurs cas de résistance aux molécules herbicides utilisées avec les variétés "tolérantes" de tournesol sont décrits en Amérique du Nord. C’est l’association de
pratiques, comme par exemple le désherbage mécanique entre les rangs de la culture et chimique sur le rang, qui peut apporter une solution à court terme à la présence de fortes populations dans
les parcelles et contribuer à plus long terme à la diminution des stocks de semences.
Néanmoins, l’efficacité des herbicides est souvent insuffisante pendant la période de l’interculture, et pour certaines productions (tournesol, pois) aux doses et périodes d’emploi préconisées.
Ce manque d’efficacité n’est pas toujours compensé par des rotations adaptées et des pratiques appropriées de désherbage mécanique. Ainsi, le développement de l’ambroisie est actuellement
important dans la culture du tournesol où la gestion de mauvaises herbes de la famille des Astéracées (bidents, lampourde, chardons) ou des Solanacées (morelle noire) est devenue plus difficile
avec le retrait de certains produits tels que la trifluraline.
Quels moyens recommander pour l’avenir ?
Sur les parcelles agricoles fortement
envahies, la gestion la plus efficace de l’ambroisie est de combiner, au cours d’une même saison culturale, techniques et choix culturaux susceptibles d’enrayer la dynamique de l’espèce. Il est
en particulier conseillé de ne plus semer de tournesol pendant dix ans dans les champs les plus touchés. Les cultures d’hiver sont alors à privilégier et il faut surtout profiter des périodes
d’interculture pour épuiser le stock de semences en favorisant des levées qui seront éliminées par des travaux légers de
faux-semis. Malgré la durée
de vie et la dormance des semences d’ambroisie dans le sol, la destruction des plantes avant production de semences réduira immanquablement la banque de graines dans la parcelle. C’est là une
règle de base de la
prophylaxie que d’amoindrir
systématiquement le potentiel d’infestation jusqu’à son épuisement total. Il est également recommandé d’éviter les jachères florales sur les zones à forte densité d’ambroisie car celles-ci
favorisent son développement. La difficulté est d’articuler ces choix avec certaines mesures environnementales (couvert végétal obligatoire pendant la période d’interculture) ou relevant de la
PAC (diversification des cultures successives).
Les difficultés de gestion que posent les autres milieux où se développe l’ambroisie ne font que renforcer la nécessité d’une prévention de l’extension de l’espèce. Les difficultés techniques
d’intervention en bord de route et l’impossibilité d’utiliser des herbicides sur les berges de rivières limitent les possibilités de gestion à court terme et doivent inciter à une restriction de
toutes les pratiques susceptibles de disperser des semences de l’ambroisie.
À l’échelle des territoires, la coordination des actions et des acteurs est un facteur déterminant dans la réussite de la lutte. C’est pour agir en ce sens au plan national, et être présent au
niveau européen et international, que l’Observatoire de l’ambroisie a été mis en place cet été, [lien vers le communiqué de presse]. Il vise à devenir un centre de référence sur l’ambroisie, plus
spécifiquement en matière :
· de connaissance sur l'ambroisie à feuilles d’armoise, en particulier ses effets sur la santé et les milieux,
· d’actions de prévention, de lutte durable, de formation et d'information sur l'ensemble du territoire national (et dans d'autres pays) dans le respect de l’environnement,
· de données scientifiques, travaux et projets de recherche ainsi que leurs applications.
Pour aller plus loin :
· Site d’information : http://www.ambroisie.info
· Le risque d’allergie au jour le jour dans votre région : http://www.pollens.fr/accueil.php
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